© Stefan Schlageter C’est quand qu’on va où ?
«Dis papa, c’est quand qu’on va où?» demandait Renaud en 1994. Aujourd’hui, on va partout, et tout de suite. Les vacances, c’est ailleurs, absolument. Vous voulez dormir dans un palace de glace, un pigeonnier, une habitation troglodyte, une maison perchée dans les arbres ou celle d’un éclusier, une ancienne gare, un phare, une chapelle? C’est possible. Vous rêvez de plonger avec des bouteilles à oxygène pour rejoindre votre hôtel sous-marin, dormir à l’intérieur d’une station radar désaffectée de l’armée américaine au fin fond de l’Amazonie, en haut d’une grue que vous pourrez faire tourner sur elle-même, dans des chalets camouflés au coeur de la forêt, la capsule de survie d’une plateforme pétrolière, un cercueil, un avion, un train, une prison? Il n’y a qu’à ouvrir le Guide des hébergements insolites, de Denise Cabelli (Métropolis), 1001 nuits insolites: guide des hôtels et chambres d’hôtes uniques et surprenants (Dakota Editions) de la même auteure, Chambres d’hôtes insolites: 120 maisons d’hôtes et hôtels de charme en France, de Marie-Dominique Perrin (Hachette), Hôtels insolites du monde, de Steve Dobson (Jonglez).
«Ça» a un nom, nous apprend La maison sur le divan (Laffont), le nouveau livre de Patrick Estrade (Comment je me suis débarrassé de moi-même, Ces souvenirs qui nous gouvernent): hétérotopies. «Les hétérotopies sont tous les lieux inhabituels pouvant possiblement nous recevoir ou nous abriter.» Patrick Estrade en retient deux principaux: la tente et le bateau. Mais il pourrait tout aussi bien parler de l’arbre, du phare ou de la grue. «(…) Le besoin de retourner aux choses primitives n’est jamais loin. Cela est sans doute inscrit dans nos gènes. Car, sinon, comment expliquer le plaisir que peuvent éprouver ces hommes et ces femmes à dormir dehors (…), avec pour tout abri un bout de tissu planté dans un piquet au-dessus de leur tête alors qu’ils pourraient se reposer sous le plafond d’une solide maison? En optant pour l’incertain, ils choisissent un retour aux sources.»
Prenez pour seul guide de voyage le livre de Patrick Estrade au moment de transhumer en un camping sur la Costa Brava, dans un chalet à la montagne ou une yourte mongole en Auvergne cet été: «Quel que soit le motif, quitter la maison n’est jamais anodin. » Le voyage n’est jamais plus beau qu’en sachant pourquoi l’on est parti.
• Isabelle Falconnier, Rédactrice en chef adjointe, L’Hebdo
La princesse est le président
Faire de l’un des plus grands classiques français du XVIIe siècle, qui ne provoque plus guère le bruit du tiroir-caisse des librairies que par la lecture obligatoire des prescriptions scolaires, un succès de librairie en en faisant tripler les ventes en quelques mois, voici l’exploit réalisé – à son insu, faut-il le préciser? – par l’actuel président français.
Quand en 2006, lors d’un congrès de son parti, l’UMP, Nicolas Sarkozy lança «(…) l’autre jour, je m’amusais, on s’amuse comme on peut, à regarder le programme du concours d’attaché d’administration. Un sadique ou un imbécile, choisissez, avait mis dans le programme d’interroger les concurrents sur La princesse de Clèves. Je ne sais pas si cela vous est souvent arrivé de demander à la guichetière ce qu’elle pensait de La princesse de Clèves…Imaginez un peu le spectacle!», il ne se doutait certainement pas qu’en voulant ainsi faire de l’étude du roman de madame de Lafayette l’opposé de l’enseignement d’un savoir pratique, il allait faire de ce livre contemporain des fables de La Fontaine l’emblème de la contestation du nivellement par le bas de la culture. Symbole d’une résistance à sa politique en général et culturelle en particulier, le badge réalisé par l’Observatoire du livre en Ile-de- France (www.lemotif.fr), clamant haut et fort «Je lis La princesse de Clèves» fut un must lors du récent salon du livre de Paris, en mars dernier, où il fut distribué gratuitement.
Car Nicolas Sarkozy avait multiplié les allusions à ce livre en 2007 et en 2008, finissant par avouer: «Enfin… j’ai rien contre, mais enfin, mais enfin… parce que j’avais beaucoup souffert sur (sic!) elle.» On ne pourrait pourtant que lui conseiller de reprendre cette saine lecture, considérée comme le premier roman moderne de la littérature française, et qui montre l’effet ravageur de la passion dans une âme qui se veut maîtresse d’elle-même…
Ayant trouvé ainsi une nouvelle vie
La princesse de Clèves en glaive se changea
Et comme bien souvent dans les fables, à l’envi,
Contre le vil moqueur la lame se tourna.
Telle est la morale de la fable…
• Pascal Vandenberghe, Directeur Général, Payot Libraire



Canada, 1903. Mary Bolton, l9 ans, vient de tuer son mari. Poursuivie par ses beaux-frères, des jumeaux géants et roux assoiffés de vengeance, la jeune veuve s’enfuit. En chemin, elle rencontre une série de personnages hauts en couleur auxquels elle s’attache un temps avant de toujours reprendre la route. Gil Adamson bâtit un grand récit picaresque, à la fois captivant et émouvant, celui de la plongée volontaire d’une jeune femme dans les espaces du Grand Nord américain.